29 novembre 2013

Entrevue avec Roger Bartra Muirá, professeur émérite à l'UNAM

Pablo A. Paranagua a publié sur son blog América Latina (VO) un excellent article consacré au Mexique, au nouveau visage du PRI (Parti Révolutionnaire Institutionnel), et au spectre politique mexicain, très différent de ce que l'on connaît en France et en Europe. A traves une entrevue de Roger Bartra Muirá, sociologue et anthropologue, professeur émérite de l'Université Nationale Autonome de México (UNAM), l'auteur nous explique les différences de positionnement politiques du PRI depuis 1928 à 2000, année ou laquelle le PAN (Parti d'Action Nationale) gagne les élections, avant de revenir au pouvoir en 2006 avec le Président Enrique Peña Nieto.

Roger Bartra Muirá
 
 
Pour situer le PRI sur l'axe droite/gauche, Roger Bartra évoque le général Lazaro Cardenas, le renoncement au nationalisme révolutionnaire, la fracture de 1994 et le soulèvement zapatiste. Plus que de droite, ou il est tout de même logique de le situer, de gauche ou du centre, pour Roger Bartra, "le PRI a toujours été pragmatique et opportuniste".

Quant à la gauche mexicaine, l'article fait remarquer que si en Europe le populisme est souvent associé à l'extrême-droite, il est en Amérique latine incarné par une gauche marquée : Hugo Chavez, Evo Morales en Bolivie, Rafael Corea en Equateur et Lazaro Cardenas puis aujourd'hui Andre Manuel Lopez Obrador au Mexique. La social-démocratie est puissante au sein de l'appareil dirigeant du PRD (Parti de la Révolution Démocratique) et a signé le pacte pour le Mexique avec le PRI et le PAN.

Pour Roger Bartra, il y a deux droites au Mexique. Le PRI qui dose populisme, nationalisme selon les fluctuations de ses intérêts et des réformes entreprises, le PAN, catholique et libéral proche des dirigeants des grandes entreprises. La gauche est de son côté éclatée entre le PRD social-démocrate  qui se coupe peu à peu de sa base populaire, et la version populiste et paradoxalement conservatrice (acquis de la révolution) du PT (Parti des Travailleurs).



Il convient d'ajouter à ces éléments, qui mettent donc en évidence de notables différences avec l'Europe et la France quant au positionnement des partis politiques, que des alliances se nouent au niveau des états pour l'élection aux postes de gouverneurs. Ce qui serait inconcevable en France est monnaie courante au Mexique ou n'importe quel parti peut s'allier avec un autre ou d'autres, avec peut être une coalition inverse dans l'état voisin.



L'article présente également les perspectives politiques du Mexique, la mise en danger du Pacte pour le Mexique signé par le PRI, le PAN et le PRD, au sujet de la réforme pétrolière et l'ouverture au secteur privé de PEMEX, l'entreprise d'état. Enfin un constat est fait sur la violence qui ne diminue pas, mais dont on parle moins.

A lire sur América Latina (VO), un blog du journal Le Monde.

PhH

6 novembre 2013

Cartouche


Novembre, au Mexique c’est le mois pendant lequel on célèbre la Révolution qui débuta en 1910 et s’acheva selon les historiens et les paramètres pris en compte, en 1917 au plus tôt en 1940 au plus tard, tant il est vrai que les soubresauts ont longtemps animé ce tumultueux chapitre de l’histoire du pays. Le 20 novembre est le jour officiel des commémorations. Période haute en couleurs, fureur, rebondissements, trahisons, massacres, elle est popularisée par des chansons épiques et romantiques (corridos de la revolucion comme par exemple Carabina 30-30), par des films (Viva Zapata, Il était une fois la révolution, …) et de nombreux romans (L’escadron guillotine de Guillermo Arriaga) ou des bandes dessinées (Historias desconocidas de la revolucion de Trino, Les amis de Pancho Villa de Leonard Chemineau). C’est l’occasion de présenter un livre peu connu, au contraire des nombreux ouvrages dédiés soit à l’histoire de cette révolution, soit à ses héros comme Doroteo Arango dit Pancho Villa, Emiliano Zapata, Porfirio Diaz, Venustiano Carranza, Victoriano Huerta…




Cartouche
Histoires vraies de la révolution mexicaine
Nellie Cambobello
Traduit de l’espagnol par Florence Olivier
Editions Caractères, 2009

Présentation et résumé de l’éditeur :

Cartouche est une œuvre du patrimoine mexicain. Une petite fille depuis sa fenêtre à Parral dans le nord du Mexique voit passer des cavaliers dans sa rue. Ils s'arrêtent, parlent aux enfants, s'entretuent, se saoulent en chantant leurs exploits. L'enfant admire les héros, contemple avec ravissement le cadavre d'un homme exécuté sous ses yeux, pleure ses amis indiens morts au combat. Brefs, tendres, morbides, ces récits sont nés des souvenirs de l'auteur, d'histoires racontées par sa mère et d'autres aînées. Nellie Campobello a décrit ce que nul autre ne voulait écrire : les moments les plus meurtriers de la guérilla de Pancho Villa contre les troupes de Carranza entre 1916 et 1920 dans le nord du Mexique. Ces fragments de mémoire sont l'unique témoignage d'un regard d'enfant sur ces faits de guerre qui ont marqué à jamais la mémoire mexicaine.


Nellie Campobello (1900? – 1983), écrivain et chorégraphe, est la seule femme ą avoir écrit sur la lutte révolutionnaire dans l’Etat de Chihuahua, au nord du Mexique. Les histoires vraies de ce livre, publié pour la première fois en 1931, sont des souvenirs d’enfant. Nellie Compobello a inauguré un style lapidaire, qui plus tard aurait pu inspirer Juan Rulfo…Cartouche est un livre unique, inégalable. Il est aujourd’hui devenu un classique de la littérature contemporaine mexicaine.


La critique de Céline Mees, de Cultures, le magazine culturel de l’Université de Liège, écrite en Juin 2012 :

Ce recueil de courts récits (1931), première œuvre en prose de l’écrivain Nellie Campobello, retrace, sur fond du conflit révolutionnaire mexicain (1910-1917), plusieurs épisodes de la vie des habitants de Parral, un petit village de montagne de l’État de Chihuahua, au Nord du Mexique.
Cartouche se caractérise avant tout par la création d’un point de vue original : celui de l’enfant qu’était l’auteur au moment de la Révolution Mexicaine, petite fille qui raconte, avec insouciance et un certain souci du détail, la violence des événements qui tissent son quotidien.
Cartouche se définit aussi par la galerie de personnages qu’il met en scène - le plus souvent, des héros de l’armée villiste et, quelquefois, des habitants du village ou des combattants des rangs carrancistes - personnages dont nous suivons les aventures, intenses et au dénouement bien souvent funeste. En somme, des portraits et des destins percutants à la manière des héros de la littérature épique.
Enfin, Cartouche allie une prose fluide, reflet du parler de la petite Nellie, à un grand lyrisme, à l’image de la première poésie de l’auteur. Les récits, par leur musicalité et leurs métaphores plastiques, inspirées du paysage ou sortant tout droit d’un imaginaire d’enfant, enveloppent le lecteur, lui faisant vivre quelques épisodes de ce chapitre de l’histoire du Mexique.
Ce livre, à la croisée du recueil de nouvelles et du roman, du récit autobiographique et de la fiction, de la prose réaliste et de la poésie, de l’insouciance et d’un certain engagement intellectuel, est un chef d’œuvre riche et énigmatique, à l’image de son auteur.


 

Carabina 30-30, corrido de la révolution, auteur inconnu
Ce titre vient de la carabine Winchester modèle 1894, calibre 30x30 (7,62), arme très prisée durant la révolution
 
Pour le lecteur désireux de connaître l'histoire en détails de la révolution, parmi les multiples ouvrages traitant du sujet, citons l'un d'entre eux écrit par quelqu'un qui y a participé, Jesús Silva Herzog (1892-1985), tout d'abord témoin de cette révolution en tant que journaliste, avant de devenir secrétaire d’un des chefs révolutionnaires. Il est par la suite devenu un universitaire, diplomate et un homme politique respecté et a notamment participé, en 1940, à la nationalisation du pétrole mexicain sous la présidence de Lázaro Cárdenas. Histoire de la Révolution mexicaine, Lux éditeur, 2010.



PhH